Tu as effectué une recherche élaborée sur internet et tu as rapatrié les meilleures clauses que tu as pu trouver pour rédiger ton premier contrat d’emploi. Néanmoins, plusieurs questionnements demeurent.
Il n’est pas toujours facile de s’y retrouver… mais surtout, est-ce que l’entreprise est suffisamment protégée ?
1. Les bases, par où commencer ?
a) La désignation du contrat
Qu’il s’agisse d’une « offre d’emploi » acceptée, d’un « contrat d’emploi », d’une « lettre de confirmation d’embauche » ou d’une « convention d’emploi », il demeure que les principales conditions de travail d’un employé devraient être couchées sur papier. L’appellation du contrat a, en soi, peu d’importance du moment où nous sommes en présence d’un employé qui s’oblige, moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle de l’employeur [1].
En réalité, la qualification du contrat dépend des faits et la principale difficulté est de déterminer si nous sommes réellement en présence d’une relation d’emploi ou si nous nous situons plutôt dans une relation prestataire de services – client (ex : un consultant).
Cette différence est cruciale car elle déterminera vos obligations contractuelles mais surtout légales (ex : déductions à la source, cotisations diverses à titre d’employeur, respect des dispositions de la Loi sur les normes du travail [2], etc.).
Bien qu’il existe plusieurs éléments à prendre en considération, il reste que le principal critère à analyser est celui de la subordination juridique. À titre d’exemple, si vous gérez la performance de l’individu, s’il ne peut déléguer son travail à un tiers, s’il doit faire autoriser ses congés ou vacances, il s’agit probablement d’une relation employeur-employé.
b) La flexibilité
Par ailleurs, le contrat de travail devrait permettre à l’entreprise de bénéficier de toute la flexibilité possible afin qu’elle puisse s’ajuster rapidement au marché. De plus, des modifications substantielles apportées par l’entreprise aux conditions de travail en cours d’embauche pourraient mener à un recours en congédiement déguisé.
Ainsi, si l’horaire ou le quart de travail est prévu, il serait judicieux de prévoir que l’employeur peut le modifier à sa discrétion. Une telle discrétion serait aussi souhaitable pour le titre d’emploi ou encore, les tâches et responsabilités de l’employé (en plus d’y prévoir la fameuse formule « toutes tâches accessoires ou connexes ».
Il serait nécessaire de prévoir que l’employé est lié par les normes ou politiques de l’entreprise qui pourrait choisir de les modifier. De manière générale, plus le contrat est détaillé et élaboré, plus les limites aux droits de gestion de l’employeur peuvent être importantes.
c) Type de contrat d’emploi
Enfin, il faut évaluer s’il y a lieu de prévoir une durée au contrat de travail. À défaut, il s’agira d’un contrat à durée indéterminée.
En ce qui a trait à ces deux possibilités, les principaux enjeux sont liés à l’obligation de fournir un préavis de fin d’emploi (ou l’indemnité qui en tient lieu) de même qu’aux motifs justifiant la fin d’emploi. Un contrat à durée indéterminée oblige, sauf en cas de faute grave, l’employeur à fournir un préavis de fin d’emploi. De plus, il faut obéir à plusieurs conditions eu égard au motif de fin d’emploi.
Quant au contrat à durée déterminée, il prend fin automatiquement à son terme sauf si l’employé continue de travailler durant cinq (5) jours consécutifs sans opposition de l’employeur [3]. Par ailleurs, mettre fin au contrat à durée déterminée avant son terme peut obliger l’employeur à rémunérer l’employé pour la durée restante au contrat.
d) La probation
La loi ne prévoit aucune période de probation pour les employés bien que ceux-ci puissent bénéficier de certains droits prévus à la Loi sur les normes du travail qu’au terme d’une période de trois (3) mois de service continu. L’employeur n’est pas limité à une durée précise quant à la période de probation.
Ainsi, pour un professionnel ou gestionnaire, une période de probation pourrait certainement être d’une durée de six (6) mois voire, d’une (1) année. Et, pour davantage de flexibilité, pourquoi ne pas prévoir qu’il est possible de prolonger la période de probation ?
2. Les clauses restrictives, oui, mais lesquelles et à quelles conditions ?
a) Les clauses liées à la propriété intellectuelle
Ce type de clauses peut être particulièrement utile au sein d’entreprises de technologies ou de recherches et développements, pour les employés clés ou ceux qui produisent quelque création au bénéfice de l’entreprise. En principe, la Loi sur le droit d’auteur prévoit qu’un employeur est le premier titulaire du droit d’auteur de l’œuvre créée par un employé dans le cadre de ses fonctions [4].
Mais, qu’en est-il pour l’œuvre créée en dehors des heures de travail, avec les outils de l’employeur ou encore, qu’en est-il des droits moraux associés à cette œuvre et de la collaboration attendue de l’employé pour que l’entreprise puisse faire valoir ses droits d’auteur ? Ces clauses méritent bien souvent d’être précises et détaillées afin de protéger adéquatement les actifs de l’entreprise.
b) Les clauses concernant la confidentialité des renseignements
Dans la plupart des cas, ces clauses sont nécessaires. Il faudrait énumérer la liste des informations confidentielles auxquelles l’employé a accès, prévoir qu’il ne peut utiliser ou divulguer ce type de renseignements et qu’il doit prendre toutes les mesures raisonnables pour en assurer la confidentialité. Selon la nature des renseignements visés, ces obligations peuvent être pour une durée indéfinie.
c) Les clauses de non-concurrence
Les clauses de non-concurrence sont souvent invalidées par les tribunaux. De fait, elles représentent une entrave importante à la liberté de travail de sorte qu’une entreprise ne peut les prévoir automatiquement dans un contrat de travail. En effet, des clauses de confidentialité et de non-sollicitation pourraient suffire à protéger les intérêts légitimes de l’employeur.
Les clauses de non-concurrence doivent être décrites dans des termes clairs et précis. Ce type de clauses peut être nécessaire lorsque l’employé joue un rôle clé, qu’il a des liens étroits et réguliers avec la clientèle, qu’il a accès à de l’information privilégiée, confidentielle et dont la divulgation à un concurrent serait hautement préjudiciable ou, si l’employé est un scientifique.
Ces clauses doivent être limitées quant à la durée, au territoire et au genre de travail [5]. Ces conditions doivent être décrites spécifiquement et demeurer raisonnables. La durée retenue devait viser la période de l’emploi de même qu’une période variant entre trois (3) mois et un (1) an de la fin d’emploi, sauf circonstances exceptionnelles. À noter que le territoire doit être celui dans lequel l’employé est appelé à exercer ses fonctions ou à y desservir de la clientèle.
Quant au territoire, il nous apparaît opportun d’établir un rayon à mesurer à partir d’une adresse précise ou d’indiquer les villes voire, le ou les pays si cela peut être justifié eu égard aux fonctions de l’employé et des activités de l’entreprise. Il est aussi approprié de référer aux fonctions de l’employé et de bien définir les activités de l’entreprise. Ajoutons que plus un produit, un service ou une technologie est unique, plus il sera possible pour un employeur de désigner un territoire étendu.
d) Les clauses de non-sollicitation
Les clauses de non-sollicitation devraient principalement viser à empêcher la sollicitation de la clientèle avec qui l’employé a été en contact pendant une période déterminée précédant sa date de fin d’emploi. Il serait utile d’empêcher également la sollicitation des employés qu’un employé pourrait tenter de recruter. Bien que la jurisprudence ne soit pas unanime, des décisions énoncent que ce type de clauses seraient assujetti aux mêmes conditions que les clauses de non-concurrence (c.-à-d. limitée quant à la durée, au territoire et au genre de travail).
Enfin, mentionnons qu’avant d’embaucher un employé, il y aurait lieu de s’informer pour savoir si celui-ci est lié par des clauses restrictives auprès d’un autre employeur. En effet, dans certains cas, votre entreprise pourrait voir sa responsabilité engagée en cas de contravention d’un employé à de telles obligations.